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10h ?

Pour moi, il est tout à fait évident que 10h est bien le premier arrêt obligatoire. Cela ressemble un peu à la recette de grand-mère 10h-midi, livre sous le bras et qui en déroge est aussitôt châtié. Donc, que ce soit un novice ou un débutant, c’est ainsi que je commence, canne au raz de l’eau et on monte doucement (doucement!) jusqu’à 10h. Bien sûr avant cela j’ai pris soin de leur montrer la longueur idéale de soie, le bras tendu à la verticale et la soie touchant l’eau. Juste après, 10h est alors la position parfaite… Parfaite pour quelques secondes, peut-être même moins?

Mon dernier étudiant n’était absolument pas convaincu.

Je continue ma diatribe par il faut sortir la soie de l’eau jusqu’au noeud avec l’avançon pour éviter d’avoir à forcer pour arracher la soie de l’eau et finalement avoir le bras, et la canne, qui dépasse la verticale sous l’impulsion. C’est à ce moment-là que j’introduis l’importance d’éviter tous les mouvements parasites, torsion du corps, mouvements du poignet, rotation de l’épaule, etc.

Tout cela est bien rodé, j’ai commencé ainsi tant de fois que c’est un long fleuve tranquille.

Mais, non, fort de ses deux cours et de sa propre expérience, rien n’y faisait. Non seulement, il ne s’arrêtait pas au sacro-saint 10h, mais il continuait à arracher sauvagement la soie.  Malgré tout, son lancer finissait quand même régulièrement très correctement: une longue boucle assez fermée pour traverser et une puissance propre à porter la mouche.

En spey, c’est facile à travailler, on sort la soie de l’eau pour ne laisser que l’avançon et il faut trouver le juste équilibre, l’impulsion minimale pour pouvoir déplacer le nylon de sa position actuelle à la position de l’ancrage. Oublions un instant l’énergie pour créer la D-Loop. La démonstration est simple, le récitatif tout autant, l’avançon doit planer juste au-dessus  de l’eau et venir se déposer à l’ancrage. Je le montre, c’est très visuel, la mouche sort de l’eau de quelques centimètres, plane gentiment et vient se poser nylon tendu à sa nouvelle position. Le creux dans le déplacement angulaire servant à la fixer.

Dans le lancer traditionnel, la démonstration est plus difficile. La vitesse entre l’eau et 10h doit être parfaite pour charger la canne ET la garder chargée. L’arrêt à 10h n’a pour seul but que de laisser à la soie le temps de sortir complètement de l’eau sans pour autant laisser la canne se redresser. Finalement l’accélération entre 10h et midi doit finir le travail et utiliser le poids de la soie pour charger à son maximum la canne vers l’avant. À ce moment-là, il ne reste qu’à arrêter la canne à midi pour transférer le maximum de cette énergie dans un effet ressort vers l’arrière. De la même façon, la magie est de trouver la synchronisation pour que la canne passe de l’avant à l’arrière et que tout le temps où la soie se déploie, elle garde le maximum de tension jusqu’au moment où toute la soie tendue à l’arrière, on amorce le mouvement vers l’avant qui va encore renforcer la tension de la canne. Un nouveau stop, et la canne rend toute la puissance et projette soie et mouche vers l’avant.

Pour en revenir au cours, ce qu’il ne comprenait pas c’était mon insistance à parler de 10h. Comment cette position pouvait-elle résoudre le problème, quelle que soit la longueur de soie ? En fait, il devait penser que puisqu’il avait beaucoup plus de soie que ma longueur idéale, lever la canne à 60 degrés ne pouvait pas la sortir complètement de l’eau. Il a donc fallu que je renverse mon discours et que j’arrête avec la position pour parler de la dynamique. En levant la canne pour faire sortir la soie de l’eau à la bonne vitesse pour garder la canne bandée jusqu’au moment où il suffit d’un léger mouvement de la main pour décoller l’avançon de l’eau et entamer l’accélération vers la verticale.

Il se trouve que tout cela se passe vers 10h, mais cela doit être une coïncidence.